[TEXTE] Performance After Party, The George Tremblay Show

Dans le cadre de l’exposition AFTERPARTY, Isabelle Fourcade et Serge Provost – The George Tremblay Show, ont été invité à présenter une performance pour le weekend d’ouverture « After party », le 26 septembre 2020. Chacune de leur performance est documentée par des photographies et un texte, rédiger par une personne de leur choix, une personne qui sera leurs yeux lors de la performance. J’ai eu l’immense plaisir d’être cette personne.

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1. EXT – Cour du doute – Jour

Fondation du Doute – Devant ce grand bâtiment dont la façade est couverte de questions et d’interrogations lancées par l’artiste Ben, une foule s’amasse.

À droite, sous un arbre, on devine une voiture couverte d’un drap de satin rouge. Une boule à facette suspendue. Deux micros au devant. Des projecteurs de part et d’autre réchauffent l’atmosphère. Le soleil brille, fin de journée, hiver prématuré. Tenue de sport chic pour Monsieur & Madame. Levée du drap. La partie(y) commence.  

Une question persiste. Où sommes-nous ?

2. EXT – Cour du doute – Jour

Ouverture du coffre. Changement de costumes. Tenue de soirée. L’envers du décor d’un film se dessine sous nos yeux. Nous sommes là, figurants de notre propre vie, nous prenons part à la scène. Une scène qui certainement n’en est pas une. Ici pas de dialogue. Simple jeux de regards entre eux et nous, nous et nous, eux et eux.

Silence – moteur – action

Costume noir et nœud papillon, robe à sequins d’une élégance folle ! Ils se mettent à danser sur une musique digne d’un grand film ! Nous entrainant indiciblement dans leur chemin, leur déplacement. Ils occupent tous les espaces de la cour, avec leur corps, avec leurs mouvements, danse de séduction, danser pour soit, pour nous. Pas de deux et tournoiement. Regards complices. Le public suit, entoure la scène, entre dans le tableau ? Difficile de trancher.

3. EXT – Cour du doute – Jour /fin de journée

Adossées au mur rouge. Deux chaises en plastique rouges. Je dois bien avouer que je ne les avais pas remarquées avant que les pas des danse du George Tremblay Show nous entrainent dans cette direction. La musique s’arrête et nous voilà ailleurs. Observateurs. Mais observateurs de quoi, de qui ? D’un monde de paraître ? D’un monde de fulgurances et de folies qui s’interrompt dès la musique terminée ? Et puis, quelle musique nous anime, est-ce cela dont il est question ? D’être animé par quelque chose, par une force ?

Ils s’installent sur ces chaises, lui à gauche, elle à droite. Plus de regard. La main dans la poche, il sort son Smartphone. Elle attrape son sac et fait de même. La suite se passerait donc ici ? Seuls. Ils scrollent leurs écrans. Dans l’attente. Ils sont seuls face à ce monde immatériel. D’un coup, je ressens l’ennui. Nous sommes mis de côté le temps d’un instant. La connivence entre nous – groupe – a disparu. Comme l’ennui d’une société qui peine à trouver sa place. Symbole d’une grande lassitude. Puis, à tour de rôle ils se lèvent. Lancinants. Des discours retentissent, des monologues – politiques ? – en français pour la voix masculine, en anglais pour celle féminine. On entend hurler la voix de Macron, jusqu’à ce qu’elle soit étouffée par les fesses de Monsieur, qui, las de cette mascarade, s’assoit, « en attendant que ça passe ». C’est drôle non ? ça ressemble un peu à l’histoire de notre vie vous ne trouvez pas ?

Il fait taire ce monologue, dans un geste insolent et gonflé d’humour. C’est drôle et triste en même temps. De déplacements, en pauses successives, nous voilà encore une fois à l’opposé de la cour.

Quelle prouesse. Manipuler la masse sans qu’elle s’en rende compte.

4. EXT – Cour du doute – Jour /nuit tombante

Le jeu des discours. Ils se tiennent face au micro. Nous voilà maintenant dans l’attente d’une parole. Peut-être vide, peut-être mimée. On projette nos envies. The George Tremblay Show nous regarde. Grand sourire. On découvre le son de leur voix. Remerciements, jeux de mots, accueil et au revoir. Invitation au voyage et au bouquet final.

Ils quittent la scène/le tableau. Moment suspendu.

5. EXT – Cour du doute – Jour + lumière artificielle chaude. /Final

Ils réapparaissent, à cet instant nous sommes dans le doute. Nous voilà de nouveau au point de départ. Face à la AUDI de collection, comme flambante neuve. On passe de la réalité à la fiction. De la fiction à la réalité. Où est la limite ? Y en a-t-il vraiment une dans cette histoire qui se construit sous nos yeux ?

Elle est sublime dans sa robe de soirée bleu nuit. Monsieur ouvre le capot, elle s’installe sur un tabouret de piano. Action – on lance la musique, « Comme prima », dans la version de Dalida, en hommage à Richard Baquié – scène finale. Se joue une partition absurde et fantasmée du bruit du moteur, comme une mélodie de piano envoutante. Ventilateur dans le dos de Madame, son foulard vole au vent, comme dans un road trip de grand classique du cinéma. L’esthétisation de la vitesse, le déplacement en moins. La boule à facette jusqu’alors suspendue se voit vidée de toute sa vitalité, Monsieur aspire l’air qu’elle contient. C’est long et laborieux, pourquoi souhaite-t-il mettre fin à la party ? La boule s’écrase, se tort. L’homme provoque sa fin, sa propre fin, sa chute en quelque sorte.

Devant mes yeux une scène magique ou un tableau surréaliste. Les projecteurs brillent, les émotions disjonctent. Joie, absurdité, cynisme.

6. EXT – Cour du doute – Jour

Il éteint le ventilateur, referme le capot. Elle se lève et quitte la scène. On éteint les projecteurs.

Clap de fin.

Retour à la réalité. Mais laquelle ?

©Corinne Fourcade
©Corinne Fourcade
©Corinne Fourcade
©Corinne Fourcade
©Corinne Fourcade
©Corinne Fourcade

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